Aux écoles

Ma culture = mon cadeau

Une activité pédagogique ou complémentaire
pour découvrir sa culture d’origine
puis le partager à son entourage

 

 

Publics cibles :
3e cycle du Primaire ou 1er cycle du Secondaire
Organismes communautaires
Groupes éducatifs

 

« Quel cadeau mon peuple est-il venu faire au monde ?… »

Je dédie ce projet aux familles et aux communautés autochtones du Québec et d’ailleurs au Canada, qui dans les années ’60 se sont vu enlever nombre de leurs enfants pour être confiés à des familles non autochtones.*
Et tout particulièrement à Marie-Émilie Lacroix qui l’a vécu, devenue enseignante, porte-parole des Premières Nations et mon amie, et qui a contribué à inspirer cette activité pédagogique

Une goutte d’eau qui manquerait si…

On raconte à propos de Mère Teresa qu’une personne lui aurait un jour demandé : «Pourquoi ramassez-vous des enfants dans les poubelles de Calcutta, alors qu’on en ramène plus encore sans cesse? C’est une goutte d’eau dans l’océan !…» Il paraît qu’elle a gardé silence un moment, puis a répondu : « C’est vrai, ce que je fais avec mes sœurs est une goutte d’eau dans l’océan. Mais si elle n’y était pas, elle manquerait»

J’ai le désir ardent que le plus grand nombre de jeunes possible, et le plus tôt possible dans leur enfance, deviennent convaincus que chaque peuple, comme chaque personne, a son cadeau à faire au monde, et que s’il ne l’apportait pas, il y aurait un trou dans le chandail de l’Humanité et dans le sien.

Chacun de nous sait ça d’expérience au fond de lui. Il voit l’arc-en-ciel, qui a besoin de toutes les couleurs pour nous faire dire « ouaoow ! » devant sa beauté. À table nous dégustons des aliments souvent venus de très loin, qui élargissent notre expérience des saveurs et leur variété se combine dans notre assiette pour nous faire saliver de plaisir, puis nous garder en santé. Un orchestre a besoin de chaque instrument pour nous faire éprouver toute la gamme des émotions… Et si chaque culture, chaque tradition humaine, était elle aussi unique  –  tout comme toi !  – et importante pour rendre le monde… plus humain?…
Bon. Comment apprivoiser un enfant à pareille vision, avant que l’adolescence ne le distraie pour un temps de sa capacité de s’émerveiller ?…

Essayons ! Voici une activité pour prendre contact avec l’héritage de son peuple d’origine, mis en contraste avec l’héritage d’une autre communauté culturelle.

Nature de l’exploration

Les jeunes vont partir à la recherche de quelque chose de leur culture  qui illustre son mode de vie particulier, puis qu’ils trouvent digne d’être connu. Ça peut être une vision de la vie, une valeur bien ancrée dans son peuple, une coutume hors de l’ordinaire, une façon de traiter les personnes aînées ou et de surmonter les défis, une manière de faire la fête ou encore d’entrer en contact –  bref quelque chose qui, à leurs yeux, représente un cadeau original de cette culture à la communauté humaine, une façon d’être humain inspirante. Ils vont le chercher, le conscientiser, l’illustrer, fêter leur réalisation, puis la partager…

À titre d’exemples, les gens issus de l’immigration reflètent souvent aux gens du Québec leur réconfort de se retrouver dans une société paisible, où ils se sentent en sécurité sans voir des serrures et des clôtures partout; qu’ils apprécient nos efforts pour valoriser l’égalité des femmes ou le respect des enfants; ou encore nos mesures mises en place pour mieux répartir les revenus, pour solutionner nos conflits par le dialogue et la médiation.

Par ailleurs, les Québécois, quand ils regardent les gens d’autres communautés qui viennent vivre parmi eux, se prennent à réfléchir sur leurs propres valeurs et style de vie, touchés par le témoignage qu’ils reçoivent d’un souci sacré pour leurs aînés vieillissants, leur souci des rapports humains au-delà de la performance, leurs façon de vivre l’instant présent et de fêter, leur résilience quelquefois étonnante quand ils ont vécu les intempéries ou la guerre.

Bien sûr les enfants ne feront pas directement de telles synthèses – qui à vous et moi nous ont pris une vie à conscientiser ! Mais ils feront les prises de conscience proportionnées à leur âge et les enrichiront avec l’aide de leurs parents et grands-parents, jusqu’à nommer un cadeau qu’eux-mêmes auront perçu. Chacun alors aura compris quelque chose de plus sur ce qui peut être porte-bonheur…

Des destinataires, des approches multiples

La proposition qui suit est offerte à titre exploratoire. Elle fait appel à la créativité, peut s’adapter au temps dont on dispose ou au contexte dans lequel on intervient. De plus, les façons de mener l’exploration s’enrichiront à mesure que des groupes l’auront vécue et qu’ils viendront raconter leur expérience.

Plusieurs contextes peuvent aussi s’y prêter. Ainsi :

– L’exploration peut être animée par les intervenants scolaires. Il y a lieu de paramétrer l’activité en fonction du Programme de l’école québécoise. Est bienvenue la participation des enseignants, celle des étudiants en formation des maîtres, celle aussi de réseaux tels que les Établissements verts Brundtland.

– L’exploration peut se se vivre aussi au sein d’un organisme communautaire ou associatif. Pensons à des associations à caractère ethnique, à des Maisons de la Famille, à des réseaux d’aînés, ou aux organismes qui s’investissent dans l’aide aux devoirs ou la francisation.

Pourquoi cette activité ?

Vous connaissez peut-être cette vision qu’on attribue au peuple Maya, vieille de peut-être 500 ans. Elle dit que lorsque les fils de Blancs se promèneront pieds nus et les cheveux longs  –  à la fin du siècle dernier ? –  ce sera l’heure de redonner les sagesses autochtones au monde. Partout des nations autochtones ont effectivement entrepris de s’y mettre aujourd’hui   –  ce qui est en même temps le plus beau cadeau qu’elles puissent se faire à elles-mêmes pour retrouver leurs racines et renouveler leur fierté d’elles-mêmes.

L’idée a surgi de transposer cette vision à nos jeunes, notamment à ceux dont la famille est issue de l’immigration de date plus récente. Les parents qui ont vécu un tel parcours seront unanimes à vous dire que leurs enfants, à mesure qu’ils deviennent adolescents, souhaitent être rapidement reconnus par leurs copains de l’école et de la rue comme Québécois à part entière. C’est aussi l’expérience que j’ai vécue avec mon fils mexicain adoptif, qui n’a pas tardé à perdre sa langue quelques mois après son arrivée au Québec.

Souvent, cette intégration se fait d’abord au prix d’entrer en conflit avec leurs parents, ou même de renier la culture du peuple dont ils sont issus. Et tout particulièrement, au prix d’affecter leur estime de soi encore malléable  –  car la fierté de sa culture et l’estime de soi voyagent ensemble beaucoup plus qu’on le croit.

Combiné aux réactions pas toujours bienveillantes de leur entourage dans les cours de récréation de nos écoles, ou aux efforts qu’ils voient leurs parents déployer pour trouver un logement ou du travail, ces jeunes peuvent en arriver à croire qu’eux et leur famille ne sont pas forcément bienvenus. Ou encore qu’ils ne font que recevoir ici, sans se douter qu’ils ont beaucoup à apporter, du fait de la richesse de leur patrimoine d’origine, du fait qu’ils contribuent à élargir nos visions du monde et nos façons d’aborder les défis de la vie.
De là viennent souvent les clans, l’exclusion ou d’autres formes de méfiance  –   défis qu’une école très métissée ou qu’un milieu matériellement moins favorisé sont plus susceptibles de rencontrer.

Pour toutes ces raisons, il y a une mémoire culturelle heureuse à faire connaître ou retrouver, aussi bien aux enfants dont les familles se joignent à nous qu’aux enfants de la société d’accueil  –  et le plus tôt possible avant que l’adolescence les entraîne dans une vision critique sans nuances. Car elle porte une énergie de croissance et d’intégration insoupçonnée, de part et d’autres des groupes culturels amenés à vivre côte à côte.

Les objectifs

Il s’agit donc de faire trouver par nos jeunes une façon créatrice de mettre en valeur leur patrimoine culturel, puis de le partager. De leur faire toucher du doigt qu’il peut être un porte-bonheur dont la communauté plus large aurait tord de se priver par ignorance  –  comme l’outil qui s’ajoute au coffre du menuisier ou l’instrument de musique qui s’ajoute à l’orchestre ou à la palette d’expression d’un compositeur.

Les bénéfices attendus

Si un jeune s’investit le moindrement dans l’exploration proposée ici –  qu’il appartienne à une famille déracinée ou qu’il origine de la société d’accueil  –  il est probable qu’il en sortira tantôt étonné du parcours de vie de ses ancêtres, tantôt admiratif du courage de ses parents, ou qu’il aura créé une nouvelle complicité avec un grand-parent  –  tout ça venant renforcer son estime de lui-même, sa reconnaissance à la vie pour la biodiversité humaine …et finalement la qualité de son intégration sociale là où il vit aujourd’hui concrètement. Il sera convaincu que sa communauté d’origine ne fait pas que recevoir, mais qu’elle nous apporte aussi quelque chose de grand.

  • Pour la progression scolaire des jeunes : en plus de pratiquer le français, l’occasion d’explorer les techniques de recherche, de communication ou de reportage. L’occasion d’identifier les valeurs-clé de la citoyenneté, des religions ou d’une mondialisation à visage humain.
  • Pour les rapports entre jeunes en classe, à l’école ou dans le quartier : une contribution au climat humain, l’occasion de débattre des défis qui se posent à l’harmonie scolaire ou sociale, et plus loin des gestes qui peuvent la créer  –  par exemple dans la cour de récréation ou le voisinage. Oui, être fier de son héritage culturel, c’est consolider son estime de soi…
  • Pour renforcer le lien familial, notamment entre parents et adolescents issus de l’immigration, qui vivent leur intégration à la nouvelle société à des rythmes différents.
  • Pour le rapprochement école-famille : une occasion de dialogue autour des valeurs familiales et sociales, et des moyens d’intégration à notre portée.
Éléments de stratégie pédagogique

À titre d’exemples :
– Un(e) enseignant(e) pourrait jumeler ses élèves deux à deux. Chacun serait invité à découvrir un cadeau qu’il reconnaît et apprécie dans la culture de l’autre. Les jumeaux s’aideront mutuellement à trouver des informations  –  pour une partie recueillies auprès de la famille du jumeau concerné, qui devient alors une sorte d’ambassadeur.

– Un réchauffement initial pourrait être que chaque jumeau devienne un moment journaliste, rédige un mini-reportage sur une journée courante dans la vie d’un enfant de son âge …au sein du peuple d’où origine son jumeau.

Déjà, pareille expérience permettrait à chaque élève de la classe d’établir une complicité concrète avec un copain d’une autre culture, qu’il aura peut-être envie de retrouver hors de l’école s’il habite près de chez lui…

Sur votre demande via le formulaire-contact de notre site, il nous fera plaisir de vous faire parvenir le texte Rendre opérationnel le projet ‘Ma culture: Mon cadeau. Il propose une démarche et des éléments alternatifs de concrétisation.

Un volet dans un projet plus grand

Vous aimerez peut-être constater que l’activité pédagogique Ma culture = mon cadeau  s’insère dans un projet plus vaste, déjà en marche chez les adultes : Cultures au coeur. Il vise à faciliter le rapprochement entre Québécois d’origine et Québécois d’adoption. Il consiste en des activités d’animation offertes en association avec l’Accorderie de Québec, doublées du site web www.culturesaucoeur.org. Belle découverte !
Au plaisir de nous passionner ensemble pour cette exploration.

Appel à tous!

Enseignants et conseillers pédagogiques, animateurs scolaires et communautaires:

N’hésitez pas à nous faire part de vos réactions à cette proposition d’activité, également à nous donner un écho sur vos initiatives d’implantation dans votre réseau.

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* Pour le contexte des pensionnats autochtones, voir cet article du journal Le Devoir.